Systématique, ordonné, Charles Dantzig s’applique à faire des listes. Oui mais voilà, l’‘Encyclopédie capricieuse du tout et du rien’ est un trompe-l’oeil. On en tourne les pages dans une joyeuse anarchie, valsant du littéraire au quasi trivial. Le ton est celui du bavardage : l’auteur se montre inconstant, badin. Il adopte un verbiage de sorbonnard, puis l’abandonne pour un soliloque de comptoir - ou celui d’un bar huppé. Tantôt Charles Dantzig irrite parce qu’il se montre péremptoire, tantôt il agace parce qu’il semble épris de son babil. Mais qu’on se rassure, son ‘Encyclopédie’ n’a rien de monochrome.
Les listes s’égrainent dans une urgence silencieuse, souterraine. Comme s’il fallait tout recenser, tout fixer sur le papier sans rien oublier, avant qu’il ne soit trop tard. La plume bondit du coq à l’âne. Pourtant l’illusion du titre dissimule une intimité profonde : à travers la pléthore de listes, ce n’est autre que lui-même qu’il écrit. Chaque article devient la pièce du puzzle Dantzig : l’écrivain joue pour mieux se jouer de la mort. Primesautier, il possède un sens de la formule réjouissant - la phrase est vive, l’esprit, incisif. Charles Dantzig pratique le pied de nez à tour de bras et cependant demeure dans le doute face à lui-même et à ses écrits. Voilà pourquoi son livre touche et convainc. Une capricieuse “encyclopédie”, délicieuse aussi.
Encyclopédie capricieuse du tout et du rien de Charles Dantzig,
Editeur : Grasset
Publication :7/1/2009